Voyage Grand format
CATHARES, MAIS PAS SEULEMENT ! LES CINQ FILS DE CARCASSONNE ÉTAIENT AVANT TOUT DES FORTERESSES DRESSÉES CONTRE L’ENNEMI ARAGONAIS.
Le sentier grimpe dru pour celui qui veut se hisser le long des flancs du Mont Ardu. Il a été tracé dans l’une des failles de la falaise qui domine la vallée de la Boulzane à près de 700 mètres d’altitude. Et alors que l’on croit atteindre son but, neuf murs dont certains autrefois fermés de portes massives jouent les chicanes, obligeant l’assaillant à d’incessants zigzags. Parvenu au sommet, une barbacane et un assommoir défendent l’entrée de la forteresse. Bienvenue au château de Puilaurens ! Avec ceux de Termes, d’Aguilar, de Peyrepertuse et de Quéribus, ils forment une belle fratrie, celle des cinq fils de Carcassonne, tous « châteaux cathares » ! « Pas du tout, – interrompt immédiatement Nathalie Garsaball, guide au château – L’appellation « châteaux cathares » est une erreur ! Les visiteurs s’imaginent qu’ils ont été construits par les cathares, or ils ne leur ont servi que de refuge et encore pas tous.» Des châteaux cathares qui, donc, ne le sont pas ! Un petit rappel historique s’impose.
Au tournant du millénaire, le catharisme est une dissidence chrétienne qui touche une bonne partie de l’Europe. Face à une papauté jugée trop dispendieuse, les cathares prônent une vie ascétique. En France, le mouvement se déploie principalement dans le midi languedocien. Intolérable, pour la papauté qui enjoint le roi de France de lutter contre ces hérétiques. Ce sera la Croisade des Albigeois, non générique donné au moyen-âge aux cathares du Sud de la France. L’aristocratie locale, généralement favorable au catharisme – quand elle ne l’est pas elle-même – accueille dans ses châteaux tous ceux qui fuient l’inquisition. Ainsi en 1240 une communauté de « bons chrétiens » est réfugiée à Puilaurens. Mais le château est alors bien différent. « Il n’en reste plus rien – précise Nathalie Garsaball – Les murailles, le donjon, les chicanes que nous admirons furent élevés ultérieurement, entre les XIIIe et XVIIe siècles.» La lutte contre les cathares et leurs protecteurs locaux fut une formidable occasion pour les rois de France, Louis VIII et surtout Louis IX (futur Saint-Louis) de mettre définitivement la main sur ces terres méridionales, alors sous influence du voisin aragonais.
LES FORTERESSES, TOUTE L'ANNÉE.
Les châteaux se visitent toute l’année. Les mois les plus favorables sont ceux de mai-juin et octobre-novembre. N’hésitez pas non plus à les visiter en hiver, vous les aurez pour vous tout seul…
L’accès aux personnes à mobilité réduite peut être compliqué voire impossible.
Épousant les formes de son improbable piton rocheux, la citadelle de Peyrepertuse comprend en fait deux zones fortifiées, un château féodal du XIIe et un donjon du XVIe.
Après la reddition des derniers cathares, Louis IX entreprend de fortifier les cinq châteaux qui longent la frontière espagnole tracée au sud des Corbières. Il conçoit Peyrepertuse comme un véritable château royal. Surnommé La Carcassonne céleste, il se déploie sur 300 mètres de long ; ses hautes murailles épousent parfaitement les contours d’un à-pic vertigineux qui se termine telle la proue d’un navire et ses tours culminent à 800 mètres d’altitude. « Il s’agit pour lui d’afficher clairement la puissance de la France. Pensée comme une véritable arme de dissuasion, la citadelle est dotée de bâtiments modernes – souligne Christelle Rouchon, guide. Ce fut l’un des chantiers les plus considérables de son temps, d’autant que le roi hâta sans cesse son achèvement.»
Comme pour les autres fils, entre vingt et trente militaires y vivent en permanence ; ils sont régulièrement approvisionnés par Carcassonne qui a le titre de sénéchaussée. Dans un texte médiéval, il est écrit : « Sur la frontière d’Aragon, est la dite Cité de Carcassonne qui est la mère et a cinq fils, (qui) sont à gages du Roi ».
« Il y a, je l’avoue, un plaisir enfantin à déambuler parmi ces ruines grandioses. Comme les châteaux de la Loire, les forteresses cathares appartiennent à l’imagerie populaire. Tout le monde en a entendu parler. Leur approche demande quelques efforts, mais leur découverte dans ces sites grandioses est toujours un moment incroyable. Comme il n’est pas toujours facile de « lire » ces vieilles pierres, n’hésitez pas à participer à une visite guidée. »
Le dernier des châteaux à entrer dans cette fratrie fut Quéribus, en 1255. Perché sur son nid d’aigle à plus de 700 mètres d’altitude, il est frère du cers, ce vent glacial l’hiver, brûlant l’été. Mais pour le roi, il est avant tout le premier poste avancé sur la frontière aragonaise. Le petit château sommital est transformé en une puissante place forte. « C’est un véritable château fort accroché sur une crête, il fait à peine 80 mètres de long sur 20 de large – précise Karine Fertille, guide – et pourtant on y compte pas moins de trois enceintes successives ! »
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De part sa position géographique, Quéribus connut de nombreuses batailles et n’a cessé d’évoluer, mêlant les éléments moyenâgeux à ceux de La Renaissance, telles ces immenses fenêtres si incongrues dans un château-fort.
« Le donjon était bien plus haut au temps de Louis IX, les travaux des XVe et XVIe siècles l’ont rabaissé afin qu’il soit moins vulnérable aux boulets de canons.» En effet, pour faire face au développement des armes à feu, les fils de Carcassonne connaissent de nouveaux aménagements, comme l’ouverture de meurtrières qui remplacent les archères devenues inutiles. Forteresse royale au temps de Louis IX, mais trop éloigné de la frontière franco-aragonaise, le château de Termes n’eut pas droit à ces modernisations. Pire encore craignant qu’il ne devienne le repère de quelque châtelain en bisbille contre le roi, en 1654, Louis XIV ordonne son démantèlement … Situé au-dessus des gorges du Termenet et de Coynepont, le château avait été l’un des plus puissants du Languedoc. Assiégé par les troupes royales en 1210, il avait résisté quatre mois, ne rendant les armes qu’à cause de la dysenterie qui affaiblissait ses soldats les uns après les autres. Aujourd’hui bien plus ruiné que ses frères, les vestiges de la chapelle, du logis seigneurial ou de la tour maîtresse témoignent encore de la grandeur perdue des seigneurs de Termes.
Malgré les perfectionnements apportés, les citadelles ne furent pas aussi imprenables qu’on le prétend. Perché sur son mamelon rocheux, le château d’Aguilar changea bien souvent de main. Après avoir été forteresse royale au XIIIe, il était, un siècle plus tard, l’antre de routiers qui rançonnaient les marchands catalans, puis il fut conquis par les Espagnols avant d’accueillir une garnison française, puis allemande à la solde de l’ennemi aragonais… Aujourd’hui, posé au milieu des vignes, la tranquillité d’Aquilar n’est plus troublée que par le temps des vendanges…
70 histoires vraies qui parlent
d’empathie, d’entraide et
d’amitié.
Du haut de son éperon rocheux, à 728 mètres d’altitude, la forteresse de Quéribus domine la plaine qui va de Tautavel à Caudiès.
En 1659, la France et l‘Espagne signent le Traité des Pyrénées qui trace leur nouvelle frontière à la cime des montagnes éponymes, bien loin désormais des citadelles du vertige.
Devenues de belles inutiles, elles tombent dans l’oubli, sortent de l’histoire, mais restent accrochées au cœur des villageois de Lapradelle-Puilaurens, de Cucugnan, de Tuchan, de Duilhac et de tous ces gamines et gamins qui venaient y jouer, y vivre l’aventure et mener leurs conquêtes comme les chevaliers d’autrefois…
À LA CONQUÊTE DE L'UNESCO !
La Cité de Carcassonne, ses cinq fils et les châteaux Lastours et Montségur sont, ensembles, candidats au Patrimoine mondial de l’Unesco. « Nous avons franchi les premières étapes – explique Sébastien Pla, ancien maire de Duilhac – et nous sommes maintenant dans la liste indicative des biens français au patrimoine mondiale, c’est dans cette liste que l’État choisira les candidats qu’il défendra auprès de l’Unesco.» Soutenez la candidature des citadelles du vertige.
70 histoires vraies qui parlent
d’empathie, d’entraide et
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GRIMPER JUSQU'AUX CHÂTEAUX CATHARES
SE RENSEIGNER : Office du tourisme de l’Aude Pays Cathare.
NOS BONS PLANS :
Pour les marcheurs, le Sentier cathare, qui n’est autre que le GR 367 est un chemin de grande randonnée qui relie Port-la-Nouvelle dans l’Aude à Foix en Ariège. Long dans sa totalité de 250 kilomètres il se décompose en douze étapes. Dans le département de l’Aude, il est possible de faire sur deux ou trois jours le tronçon entre Durban et Duilhac. Il permet de visiter les châteaux d’Aguilar, de Quéribus et Peyrepertuse, avec une nuit en yourte. Des variantes existent pour les vélos et les chevaux.
Sur près de 60 kilomètres de ligne ferroviaire centenaire, le Train Rouge conduit ses passagers du Pays Cathare aux plaines catalanes des Fenouillèdes. Les forêts, les vignobles et la garrigue se partagent les pentes des montagnes jusqu’aux crêtes rocheuses calcaires. Sous les falaises en promontoire se découvrent les Corbières et les châteaux de Quéribus et de Puilaurens.
Avant de partir n’oubliez pas de télécharger les deux applis gratuites Pays cathare, le guide et Castrum, le jeu. Elles vous accompagneront dans les châteaux, cités médiévales, abbayes et musée de l’Aude afin de vous en dévoiler tous les secrets.
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