Lui, c’est Jean Parisot de Valette. Né en 1494 dans une famille de la petite noblesse du Rouergue (l’actuel Aveyron), il entre à 20 ans dans l’ordre des chevaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem. Après Rhodes, Rome, Tripoli, ses aventures croisées l’amène dans l’archipel maltais. Elu grand maître de l’ordre par ses compagnons, il sort victorieux du siège de Malte par les Ottomans, en 1565. Le fort St-Elme est détruit. Qu’à cela ne tienne! Il le fait reconstruire et supervise les plans d’une nouvelle cité, qui portera son nom. La Valette, la capitale de l’île de Malte, est née! Elle va devenir le bastion de l’Occident en Méditerranée. Quant à l’Ordre de Malte, il se dédie aujourd’hui à des missions caritatives et reste actif dans 120 pays.
La cité de La Valette, première version, fut construite en moins de 15 ans à la fin du XVIe siècle. Menés par des ingénieurs militaires, les travaux ont principalement été réalisés grâce aux prisonniers turcs suite au Grand Siège. Avec ses remparts garnis de fossés, ses rues organisées en quadrillage et ses palazzi à étages, c’est le premier exemple de planification urbaine au monde! Depuis, les Anglais sont passés par là et on ajouté des bow-windows aux façades. Une bonne piste pour admirer le résultat: la spectaculaire Triq Sant’Orsla, dans le centre historique de La Valette.
Pas d’hésitation! Pour découvrir la baie de Grand Harbour, le formidable appareil défensif bâti au XVIe siècle par les chevaliers de Malte, on saute dans un water-taxi. Ici, on appelle ces jolis petits bateaux en bois verni les dghaisa. Au programme de la balade, au départ des Barraca Gardens, le fort de St Elmo, repris aux Ottomans et devenu musée de la guerre, puis les trois cités historiques de Birgu, Senglea et Copiscua, face à La Valette. En chemin, on collectionne dômes d’églises, ports de poche et même plages urbaines.
Là, on est au San Paulo Naufrago, au croisement des rues Santa Lucia et Saint Paul, dans la cité historique de La Valette. Sa terrasse a poussé sur les escaliers qui dévalent vers la mer. Ce micro-café est le repaire des trentenaires branchés. Tables et coussins sur les marches côté rue, live music les vendredis soirs, c’est le spot parfait pour siroter une Cisk, la bière maltaise ou un gin tonic à la tombée du jour. De 1,50 à 5 €.
Au-dessus du port de Senglea, l’ancienne tour de guet de la Gardjola offre une vue prisée sur le Grand Harbour et La Valette. D’ailleurs, elle fait les délices des guides et des brochures touristiques. Ce matin-là, deux jeunes Anglaises en robes vaporeuses admiraient le panorama… En observant de près le bastion, on repère deux motifs sculptés dans le calcaire doré : un oeil et une oreille, qui rappelaient autrefois que le port était sous bonne surveillance.
La co-cathédrale Saint-John de La Valette (on dit « co » parce qu’elle partage le titre avec la cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul de Mdina) a été construite par les Chevaliers de Malte au XVIe siècle, mais son décor, du pur style baroque, date du XVIIe siècle. Le plus impressionnant dans la visite, c’est le spectacle du sol en marbre coloré. Des cénotaphes y représentent 400 chevaliers de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem. Parmi eux, la Grande Faucheuse fait son marché…
Avant de devenir république indépendante, en 1964 et de rejoindre l’Union européenne, en 2004, Malte est restée annexée à la Grande Bretagne pendant 164 ans. L’île conserve de nombreuses traces de son passé colonial, notamment dans son système éducatif. A l’école, les cours sont donnés en anglais et à la sortie de l’Université, les jeunes diplômés sacrifient en grande pompe à la cérémonie de « graduation ». Ce jour-là, toges noires, toques et talons hauts étaient de sortie aux Jardins botaniques de San Anton, pour la séance photo souvenir.
Vestige de leur histoire militaire? Les Maltais adorent les feux d’artifices… et les fanfares! Dans l’île, chaque village, chaque quartier a la sienne. Ces « marching bands » se livrent à de véritables joutes pendant les traditionnelles Festas ou les parades militaires. Ici à l’oeuvre : la fanfare de la mini-armée maltaise (elle compte seulement trois bataillons). Admirez au passage le look british-colonial des uniformes! Le concert a lieu à la City Gate, devant le nouveau parlement de Malte. Un étonnant bloc de calcaire, conçu en 2015 par l’architecte « star » Renzo Piano. Le choc des cultures!
On se souvient tous de « Midnight Express », l’histoire de ce jeune Américain arrêté et emprisonné en Turquie pour trafic de drogue. Inspiré d’un récit autobiographique, le film d’Alan Parker avait raflé deux Oscars pour son scénario (adapté par Oliver Stone) et sa musique originale (signée Giorgio Moroder). Comme Ankara avait refusé de l’accueillir, le tournage eut lieu à Malte, en 1977. Ce bâtiment en ruines du fort St-Elmo de La Valette (aujourd’hui en grande partie rénové et devenu musée de la guerre) a servi aux scènes de prison. La scène de la « section 13 » pour les criminels aliénés a été tournée à la Sacra Infermeria, l’Hôpital historique des chevaliers de Malte et celle du souk dans le vieux marché couvert, sur Merchant’s Street. La majorité des acteurs étaient des Maltais, jouant des Turcs.
On a le droit de rêver! Pendant la traversée de la baie sur le ferry Sliema-La Valette, ce vieux voilier au repos m’a fait penser à Corto Maltese, le héros des BD de Hugo Pratt. Son fantôme devait rôder dans les parages, j’allais peut-être le croiser sur la jetée… Car oui, d’après les infos glanées au fil des albums, Corto serait né à Malte en 1887. Fils d’une tzigane de Séville et d’un marin britannique de Cornouailles, il y aurait grandi bercé par les histoires de marins. Et sans doute a-t-il rêvé d’aventure et de terres inconnues, gamin, au pied du fort St Elmo. D’ailleurs là-bas, sur le pont du voilier, n’est-ce pas l’éclat de sa boucle d’oreille?
Avec Air Malta, vols quotidiens de Paris à La
Valette, 4/semaine depuis Orly Ouest et 4/semaine depuis CDG.
Dans ce palazzo maltais du XIXe siècle, propriété de la même famille depuis quatre générations, 8 luxueuses suites à l’esprit contemporain.
81 Old Theatre Street, La Valette
Cette pimpante maison du port de Copiscua abrite 4 chambres d’hôtes aux murs de pierres apparentes et aux salles de bain confort +une terrasse sur le toit.
36/37 Triq Santa Teresa, Copiscua
Une terrasse chic, face à la baie de Grand Harbour et au fort St Angelo. Spécialités de poissons, comme le filet de rouget/fricassée de coquillages et sélection de vins maltais.
4/5 Barriera Wharf, La Valette
Un restaurant familial, dans une ruelle de Birgu. Murs de pierre et cuisine aux saveurs de l’île : raviolis ricotta-tapenade, lapin sauté aux légumes de saison…
Triq Pacifiku Scicluna, Birgu