L’entretien

Jacques Décoret

« La cuisine, c’est un voyage en enfance »

Au coeur de Vichy, le chef étoilé et meilleur ouvrier de France Jacques Décoret réinvente à sa table les saveurs ludiques de l’enfance. Un voyage culinaire nourri par une double passion pour l’Auvergne, sa terre natale, et la culture japonaise.

BIO EXPRESS

1965 : Naissance à Saint-Pierre-Laval, dans l’Allier

1980 : Formation à l’école hôtelière de Cusset, près de Vichy

1986 : premier prix au concours du meilleur apprenti de France pour la région Auvergne

A partir de 1990 : gravit les échelons dans les plus prestigieuses cuisines du pays : Maison Troisgros à Roanne, la Côte Saint Jacques à Joigny, le Moulin d’Abbaye à Brantôme, L’Arpège d’Alain Passard à Paris puis le restaurant Régis Marcon à Saint-Bonnet-le-Froid.

1996 : Meilleur Ouvrier de France

2000 : Création de la Maison Décoret à Vichy, classée une étoile au Michelin.

2008 : La Maison Décoret s’installe dans un chalet Second Empire, au coeur de Vichy. La table se complète d’un hôtel 4* de 5 chambres intimistes, estampillé Relais & Châteaux.

BIO EXPRESS

1965 : Naissance à Saint-Pierre-Laval, dans l’Allier

1980 : Formation à l’école hôtelière de Cusset, près de Vichy

1986 : premier prix au concours du meilleur apprenti de France pour la région Auvergne Centre

A partir de 1990 : gravit les échelons dans les plus prestigieuses cuisines du pays : Maison Troisgros à Roanne, la Côte Saint Jacques à Joigny, le Moulin d’Abbaye à Brantôme, L’Arpège d’Alain Passard à Paris puis le restaurant Régis Marcon à Saint-Bonnet-le-Froid.

1996 : Meilleur Ouvrier de France

2000 : Création de la Maison Décoret à Vichy, classée une étoile au Michelin.

2008 : La Maison Décoret s’installe dans un chalet Second Empire, au coeur de Vichy. La table se complète d’un hôtel 4* de 5 chambres intimistes, estampillé Relais & Châteaux.

« Je suis né et j’ai grandi dans un petit village de l’Allier, St-Pierre-Laval, 365 habitants, à 40 km de Vichy. La première fois que je l’ai quitté, c’était en 1973, j’avais 8 ans. On a embarqué avec toute la famille dans la 2 CV, direction la Charente, pour aller rendre visite à un copain de mon père. 350 km avec la barre dans les fesses, je m’en souviens encore! C’est là-bas, à Royan, que j’ai découvert la mer… Mais c’était l’exception, car mes parents prenaient peu de vacances, il fallait travailler. L’été, on allait chez mes grand-parents, agriculteurs dans la région. On faisait les foins, on ramassait les myrtilles, on pêchait à la rivière, on faisait du vélo. Mon frère et moi, on accompagnait aussi souvent mon père, qui était menuisier, dans les fermes, les demeures et les châteaux du coin pour réparer des portes de grange ou mastiquer des vitres. Mais mes plus beaux voyages d’enfance, je les ai faits dans la cuisine de ma mère. Elle avait suivi les cours de l’école ménagère et elle m’apprenait les recettes du gratin dauphinois, de la tarte aux pommes, des îles flottantes, j’adorais déjà la pâtisserie! Quand j’ai eu 14 ans, mon père m’a demandé si je voulais devenir menuisier, comme lui. Je lui ai dit “Non, je préfère être cuisinier”. C’est comme ça que j’ai atterri à l’école hôtelière de Cusset, près de Vichy. Sept ans en internat et pas le meilleur souvenir de ma vie. Mais à la sortie, j’ai remporté le concours du meilleur apprenti de France pour la région Auvergne Centre et la finale à Paris. »

« Oui, mais il a fallu travailler dur d’abord. J’ai commencé comme commis dans un Relais & Château près de Lausanne, sur les bords du lac Léman. A l’époque, c’était une grande maison, avec une brigade de 15 personnes en cuisine. Le chef me coachait à la dure. Pour me mettre à niveau, j’ai dû bosser comme un fou tous les soirs après le travail, me plonger dans des livres techniques de cuisine, apprendre à désosser la viande chez le boucher, encaisser les critiques… Alors je n’ai pas vu grand chose de la montagne. Pour les voyages, je me suis rattrapé ensuite. En 1987, j’ai fait mon service militaire comme cuisinier à bord du Jean de Vienne, une frégate de la Marine nationale. C’était les derniers temps de la guerre entre l’Irak et les Etats Unis, et pendant presque un an, le navire a patrouillé de la Méditerranée à la mer d’Oman, en faisant escale aux Baléares, au Portugal, aux Canaries… A bord, il y avait 400 hommes et la cuisine était soignée. Et quand on recevait l’amiral du Foch ou du Charles de Gaulle, on mettait les petits plats (en argent) dans les grands : j’étais alors très fier de mes moulins à vent en pâte à sel! A mon retour, tout s’est accéléré : je me suis marié et j’ai été engagé comme chef de partie chez Troisgros, à Roanne. Puis j’ai enchaîné plusieurs belles maisons dont L’Arpège à Paris. »

« Dans les années 1990,  les Japonais étaient fascinés par la cuisine française. Ils invitaient volontiers les chefs à venir faire des démonstrations dans leurs palaces. On travaillait avec des interprètes, on cuisinait des poulets de Bresse venus spécialement par avion et on nous déroulait le tapis rouge! Au fil de mes voyages là-bas (15 à ce jour), j’ai découvert une autre culture : une cuisine d’une extrême rigueur, des équipes très hiérarchisées, les temples shintoïstes végétariens, le marché aux poissons de Tokyo à 3 heures du matin, la cérémonie rituelle du thé, la production de boeuf de Kobé, les couteaux du Kensai, dans la région d’Osaka, la céramique traditionnelle…. J’ai gardé un souvenir particulièrement fort du restaurant traditionnel Ryote à Kyoto, tenu par la même famille depuis 17 générations et classé 3 étoiles au Michelin : un ruisseau passait par la cuisine et c’est là qu’on mettait les ingrédients à refroidir! Bien sûr, toutes ces expériences ont en partie marqué ma cuisine : je suis par exemple devenu adepte du filetage du poisson ou des bouillons, j’utilise aussi volontiers des ingrédients comme le vinaigre de riz, les pousses de soja ou le kumbawa. Mais du Japon, j’ai surtout gardé l’idée que la tradition mérite d’être cultivée, qu’elle passe aussi par la transmission. C’est ce qui nous a conduit, mon épouse Martine et moi, à ouvrir notre propre Maison à Vichy, la reine des Villes d’eaux françaises, en 2000. Une belle aventure, dans laquelle comptent bientôt nous rejoindre nos enfants : Alexis, actuellement chez Troigros, Antoine chez Lenôtre et Agathe, la plus jeune… ».

« En 2008, notre établissement s’est installé dans un lieu emblématique de l’histoire de Vichy : un chalet Second Empire en briques construit sous Napoléon III. Nous l’avons décoré à notre goût, en complétant le restaurant d’un hôtel 4 étoiles intimiste de 5 chambres.  Avec sa verrière contemporaine et sa terrasse végétalisée, le cadre est déjà un voyage en soi. Le dépaysement se poursuit dans l’assiette. Aujourd’hui, chacun peut partir à l’autre bout du monde en 24 heures. Mais ce qui m’amuse, ce qui me stimule, c’est d’initier mes hôtes aux saveurs de ma région natale, l’Auvergne. Dans les recettes que j’élabore, je recherche les goûts et les jeux de l’enfance en me laissant inspirer par les lieux. Nous avons chez nous la plus belle chênaie d’Europe, la forêt de Tronçais, plantée par Colbert au XVIIe siècle : je propose en amuse-bouche des chips de topinambour, façon feuille de chêne en trompe l’oeil. Je décline la pastille Vichy, symbole de notre ville, en parfait glacé, accompagné d’un Vichy-fraise détourné. Et j’aime mettre en valeur les produits locaux : nos labels de viandes et de volailles, la truite fumée du Sichon, affluent de l’Allier, les lentilles de Chatel-Montagne, les vins de Saint-Pourçain, la moutarde de Charroux, l’huile de noix du moulin Gribory à Châtelus… Notre maison est d’ailleurs la seule à proposer une carte de 17 eaux uniquement issues de notre territoire. Mon travail est un éternel retour aux sources, en somme.»

SE FAIRE PLAISIR

Menu Sources (déjeuner uniquement) à partir de 45 €. Menu Monts et Bocages à partir de 75 € (115 € avec accords mets/vins/eaux). Menu Voyage à partir de 125 € (195 € avec accords mets/vins/eaux).

Maison Décoret, 15 rue du Parc, 03200 Vichy. 

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